Ces mots présentent deux anomalies considérables. La première, c'est qu'ils sont étymologiquement identiques, ne différant que par la prononciation ;
attaquer
est la prononciation picarde d'attacher. La seconde est que,
tache et
tacher étant les simples de nos deux verbes, les composés
attacher et
attaquer ne présentent pas, en apparence, dans leur signification, de relation avec leur origine. Il n'est pas mal
à l'usage d'user de l'introduction irrégulière et fortuite d'une forme patoise pour attribuer deux acceptions différentes à un même mot ; et même,
à vrai dire, il n'est pas probable, sans cette occasion, qu'il eût songé à trouver dans
attacher le sens d'
attaquer.
Mais comment a-t-il trouvé le sens d'
attacher dans
tache et
tacher, qui sont les simples de ce composé ?
C'est que, tandis que dans
tache mourait un des sens primordiaux du mot qui est : ce qui fixe, petit clou, ce sens survivait dans
attacher.
Au seizième siècle, les formes
attacher et
attaquer s'emploient l'une pour l'autre ; et Calvin dit
s'attacher
là où nous dirions
s'attaquer. Ce qui attaque a une pointe qui pique, et le passage de l'un à l'autre sens n'est pas difficile. D'autre part,
il n'est pas douteux que
tache, au sens de ce qui salit, ne soit une autre face de
tache au sens de ce qui fixe ou se fixe. De la sorte
on a la vue des amples écarts qu'un mot subit en passant du simple au composé, avec cette particularité ici que le sens demeuré en usage dans le simple disparaît
dans le composé, et que le sens qui est propre au composé a disparu dans le simple complètement. C'est un jeu curieux à suivre.