Ce mot est un exemple frappant de la force de la tradition dans la conservation des vieux mots, malgré le changement complet des objets auxquels ils s'appliquent. Dans
artillerie,
il n'est rien qui rappelle la poudre explosive et les armes à feu. Ce mot vient d'
art, et ne signifie pas autre chose que objet d'art, et, en particulier, d'art
mécanique. Dans le Moyen Âge,
artillerie désignait l'ensemble des engins de guerre soit pour l'attaque, soit pour la défense. La poudre
ayant fait tomber en désuétude les arcs, arbalètes, balistes, châteaux roulants, béliers, etc., le nom d'
artillerie passa aux nouveaux
engins, et même se renferma exclusivement dans les armes de gros calibre, non portatives. Il semblait qu'une chose nouvelle dût amener un nom nouveau ; il n'en fut rien. Le néologisme
ne put se donner carrière ; et, au lieu de recourir, comme on eût fait de notre temps, à quelque composé savant tiré du grec, on se borna modestement et
sagement à transformer tout l'arsenal à cordes et à poulies en l'arsenal à poudre et à feu. Seulement, il faut se rappeler, quand on lit un texte du quatorzième
siècle, qu'
artillerie n'y signifie ni arquebuse, ni fusil, ni canon.