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Félibrige

Le Félibrige, founda en 1854 pèr Frederi Mistral

Études

Le Félibrige, un incertain nationalisme linguistique, par Philippe Martel, in Mots, les langages du politique (2004)

Les félibres au XIXe siècle : qui sont-ils ? d'où viennent-ils ? in L'homme du Midi : sociabilités méridionales (2003)

Les félibres du XIXe siècle étaient-ils des nationalistes occitans ?, in Un temps pour tout : études sur les mutations de l'autorité de l'Antiquité au XXIe siècle (2019)

Le petit monde de l'édition en langue d'oc au temps des félibres (fin XIXe siècle) in Bibliothèque de l'École des chartes (2001)

Le dernier des félibres ?, in Le mythe du dernier locuteur, Lengas (2007)

Collectors e felibres, in Contes e cants, les recueils de littérature orale en pays d'oc (2004)

L'idée latine du Félibrige : enjeux, boires et déboires d’une politique étrangère régionaliste (1870-1890) par Nicolas Berjoan, in Revue d'histoire du XIXe siècle (2011)

Les musées félibréens : une Provence « éternelle », par Marie-Hélène Guyonnet, in Ethnologie française (2003)

La folklorisation félibréenne de la Provence : l'exemple de Marcel Joannon, dit Marcel Provence, in Du folklore à l'ethnologie (2009)

Les fêtes en Provence autrefois et aujourd'hui, ouvrage dirigé par Régis Bertrand & Laurent-Sébastien Fournier (2014)

Le Félibrige et les fêtes : un souci d'authenticité, par Pierre Pasquini

Les virées estivales des Cigaliers : une certaine idée de la fête félibréenne, par Philippe Martel

Présence de la fête et du discours sur la fête dans le Tresor dóu Felibrige de Frédéric Mistral, par Jean-Claude Bouvier

Le Félibrige : une association moderne ? par Pierre Pasquini, in Provence historique (2002)

Les Félibréjades : une sociabilité en représentation (1997)

Le blocus de Frigolet et sa représentation dans le Félibrige par Rémi Venture, in Provence historique (2007)

La construction d'un panthéon félibréen par Albert Giraud, in Usages savants et partisans des biographies (2011)

Maurras, Mistral et le Félibrige : le rôle de la référence provençale dans l'idéologie de l'Action française, par Catherine Valenti, in Les langues du Sud : entre érosion et émergence (2004)

Van Gogh et les félibres par Marcel Bonnet, in Bulletin des Amis du Vieil Arles (1990)

Trois « félibres rouges » devant les guerres : Fourès, Estieu, Perbosc, par Hervé Terral, in Lengas

L'idée latine du Félibrige et la Renaissance romanche (1874-1914), par Bettina Berther Desax, in Revue des langues romanes (2020)


La Provence, usages, coutumes, idiomes, depuis les origines, le Félibrige et son action sur la langue provençale, avec une grammaire provençale abrégée, par Henri Oddo (1902)

Des Alpes aux Pyrénées : étapes félibréennes, par Paul Arène & Albert Tournier (1892)


Le Félibrige par Émile Ripert (1924)

Histoire du Félibrige par Gaston Jourdanne (1897)

Précis de l'histoire de la littérature des félibres, par Mauritz Boheman (1906)

Les félibres, à travers leur monde et leur poésie par Eugène Lintilhac (1895)

L'action sociale du Félibrige, par Albéric Cahuet (1897)

Régionalisme et Félibrige par Félix de La Salle de Rochemaure (1911)

Le Félibrige devant la patrie et l'école par Paul Mariéton (1886)

Les visées du Félibrige par Raoul Lafagette (1896)

Croisade du provençal contre le français par Eugène Garcin (1869)

Jaurès et le Félibrige par Joseph Anglade, in Mercure de France (1926)

Du fédéralisme de Proudhon au Félibrige de Mistral par Yvan Gaussen (1927)

Textes & Documents

Armana prouvençau (Almanach provençal), revue du Félibrige (1855-1937) + version Internet archive

La Revue félibréenne dirigée par Paul Mariéton : 1885 & 1887-88 - 1891 - 1892 - 1893 - 1894 - 1896 - 1898-99 - 1903

Lou Felibrige : revue dirigée par Jan Monné : 1887-91 & 1892-96 - 1897-1901 - 1902-06


Cartabèu de santo Estello, recuei dis ate óuficau dóu Felibrige en 1876 : textes et statuts du Félibrige


Anthologie du Félibrige provençal, poésie, textes & traductions en français, par Charles-Pierre Julian & Pierre Fontan (1920) : I & II

Chants des Félibres, textes & traductions en français, par François Delille (1891)

Chansonnier provençal, chants des félibres et des cigaliers, textes & traductions en français, par Albert Tournier (1887)


Les majoraux du Félibrige, des origines à nos jours (21 mai 1876 - 21 avril 1901), notes et documents, par Raymond Lefèvre (1901)

Catalogue félibréen et du Midi de la France, notes et documents sur le Félibrige, avec la bibliographie des majoraux des origines à nos jours (1876-1901) par Raymond Lefèvre (1901) & supplément (1904)

Les maîtres du Félibrige par Étienne Cornut (1897)


Le chant des Félibres de Frédéric Mistral, en provençal & français (1854)

Cinquantenaire du Félibrige : chant de Frédéric Mistral (1904)

Qu'est-ce qu'une langue ? discours de Frédéric Mistral (1868)


discours d'Ernest Renan prononcé à la fête des Félibres (1891)

Créé par Frédéric Mistral et ses amis, le Félibrige est officiellement né le 21 mai 1854, jour de la sainte Estelle, à Font-Ségugne, près d'Avignon.

Voici des extraits de la définition que donne Frédéric Mistral, dans son dictionnaire de la langue provençale, le Trésor du Félibrige, et le récit de son livre, Mémoires et récits. Les amoureux de la Provence doivent lire ce livre !



Moun espelido, memòri e raconte par Frederi Mistral (1906) + version texte [PDF]

Mes origines, mémoires et récits par Frédéric Mistral (1906)

Définition du Félibrige
Extraits du Tresor dóu Felibrige (dictionnaire provençal-français) :

FELIBRE

Félibre, poète provençal de la seconde moitié du XIXe siècle, littérateur de langue d'Oc, membre du Félibrige

Le mot felibre fut adopté en ce sens, à partir de l'année 1854, par les promoteurs de la renaissance linguistique et littéraire du Midi. Le 21 mai 1854, sept jeunes poètes, MM. Théodore Aubanel, Jean Brunet, Anselme Mathieu, Frédéric Mistral, Joseph Roumanille, Alphonse Tavan et Paul Giéra, amphytrion, se réunirent au castel de Fontségugne, près Châteauneuf-de-Gadagne (Vaucluse), pour concerter dans un banquet d'amis la restauration de la littérature provençale. Au dessert on posa les bases de cette palingénésie et on chercha un nom pour en désigner les adeptes. On le trouva dans une poésie légendaire que M. Mistral avait recueillie à Maillane, poésie qui se récite encore en guise de prière dans certaines familles du peuple. C'est un récitatif rimé dans lequel la Vierge Marie raconte ses sept douleurs à son fils dans une vision de saint Anselme. Voici le passage qui contient le mot felibre :



La quatriemo doulour qu'ai souferto pèr vous,
O moun fiéu tant precious,
Es quand vous perdeguère,
Que de tres jour, tres niue, iéu noun vous retrouvère,
Que dins lou tèmple erias
Que vous disputavias
Emé li tiroun de la lèi,
Emé li sét felibre de la lèi.

Le mot felibre, aussi inconnu du reste que le mot tiroun, ayant évidemment dans ce morceau le sens de « docteur de la loi », fût acclamé par les sept convives, et l'Armana prouvençau, organe de la nouvelle école proposé et fondé dans la même séance, l'Armana prouvençau pèr lou bèl an de Diéu 1855, adouba e publica de la man di felibre, annonça à la Provence, au Midi et au monde que les rénovateurs de la littérature provençale s'intitulaient « félibres ».



FELIBRIGE

Félibrige, association des félibres, œuvre des nouveaux troubadours, renaissance provençale

Origine du Félibrige
Les sét felibre de la lèi évoque un passage raconté par l'Évangile de Luc : Jésus au temple, assis auprès des docteurs de la loi (Luc, 2, 46). Pour Frédéric Mistral, le Félibrige reposait sur une loi : la Torah du Félibrige portera le nom de Tresor dóu Felibrige (Trésor du Félibrige). L'évocation biblique se retrouve aussi avec l'étoile qui a conduit les bergers auprès de l'enfant Jésus. Santo Estello (sainte Estelle) est la patronne des Félibres.

Les sept Félibres évoquent la Pléiade, les sept auteurs de la langue française de la Renaissance : Pierre de Ronsard, Joachim du Bellay, Jacques Peletier, Rémy Belleau, Antoine de Baïf, Pontus de Tyard et Étienne Jodelle.

Les sept félibres sont : Frédéric Mistral, Joseph Roumanille, Théodore Aubanel, Jean Brunet, Paul Giéra, Anselme Mathieu et Alphonse Tavan.

Paul Giéra est le propriétaire du château de Font-Ségugne, à Châteauneuf-de-Gadagne (voir carte IGN).

Le Félibrige évoque aussi l'Académie française : le Félibrige, c'est l'académie provençale dont l'objectif est de définir une graphie de la langue provençale, et de réaliser le dictionnaire de l'« Académie ». Ce sera l'œuvre de Frédéric Mistral : le Trésor du Félibrige, c'est le trésor de la langue provençale.

Félibrige

les sept Félibres de Font Ségugne

Moun espelido, Memòri e raconte

Mes origines, Mémoires et récits
par Frédéric Mistral

Font Ségugne

Erian, dins l'encountrado, un roudelet de jouve, ami coume de gréu, e que nous endevenian, coume se poudié pas miés, pèr aquelo santo obro de reneissènco prouvençalo. E i'anavian dóu tout.

Nous étions, dans la contrée, un groupe de jeunes, étroitement unis, et qui nous accordions on ne peut mieux pour cette œuvre de renaissance provençale. Nous y allions de tout cœur.

Font-Segugno, au pendis dóu planestèu de Camp-Cabèu, fàcio lou Ventour, alin, e la coumbo de Vau-Cluso que se vèi à quàuqui lègo. Pren soun noum d'uno eigueto que de « seguido » rajo au pèd dóu castelet. Un delicious bouquet de roure, d'acacia e de platano, I'amago contro l'uscle dóu soulèu e dóu vènt.

Font-Ségugne, au penchant du plateau de Camp-Cabel ; regarde le Ventoux, au loin, et la gorge de Vaucluse qui se voit à quelques lieues. Le domaine prend son nom d'une petite source qui y coule au pied du castel. Un délicieux bouquet de chênes, d'acacias et de platanes le tient abrité du vent et de l'ardeur du soleil.


« Font-Segugno, dis Tavan (lou felibre de Gadagno), es encaro l'endré mounte van, lou dimenche, li calignaire dóu vilage. Aqui an l'oumbro, lou silènci, la frescour, lis escoundudo. Aqui i'a de pesquié, emé si banc de pèiro garni d'èurre. Aqui i'a de draiòu, mountant e davalant, bestort, dins lou bousquet. Aqui i'a bello visto, cant d'aucèu, murmur de fueio e risoulet de fountaniho. Pertout, subre la tepo, poudès vous asseta, rava l'amour, se sias soulet, e, se sias dous, lou faire. »

« Font-Ségugne, dit Tavan (le félibre de Gadagne), est encore l'endroit où viennent, le dimanche, les amoureux du village. Là, ils ont l'ombre, le silence, la fraîcheur, les cachettes ; il y a là des viviers avec leurs bancs de pierre que le lierre enveloppe ; il y a des sentiers qui montent, qui descendent, tortueux, dans le bosquet ; il y a belle vue ; il y a chants d'oiseaux, murmure de feuillage, gazouillis de fontaine. Partout, sur le gazon, vous pouvez vous asseoir, rêver d'amour, si l'on est seul et, si l'on est deux, aimer. »

Voulias-ti, pèr lou brès d'un raive glourious e pèr l'espandimen d'uno flour d'ideau un rode mai en favour qu'aquelo court d'amour discrèto, au miradou d'uno coustiero, au mitan di liunchour azurenco e sereno, em'un vòu de jouvènt qu'adouravon lou Bèu souto li tres espèci « Pouësìo, Amour, Prouvènço » identico pèr éli, e quàuqui damisello graciouso, afestoulido, pèr ié teni soulas !

Vouliez-vous, pour berceau d'un rêve glorieux, pour l'épanouissement d'une fleur d'idéal, un lieu plus favorable que cette cour d'amour discrète, au belvédère d'un coteau, au milieu des lointains azurés et sereins, avec une volée de jeunes qui adoraient le Beau sous les trois espèces : « Poésie, Amour, Provence », identiques pour eux, et quelques demoiselles gracieuses, rieuses, pour leur faire compagnie !


L'astre s'encapitè qu'un dimenche flouri, lou 21 de Mai 1854, en pleno primavero de la vido e de l'an, sèt d'aquéli pouèto s'anèron trouva 'nsèmble au castelet de Font-Segugno : Pau Giera, un galejaire que se signavo Glaup (pèr anagramo de Paul G.) ; Roumaniho, un proupagaire que, sènso l'èr de rèn empuravo de-longo à soun entour lou fiò sacra ; Aubanèu, que Roumaniho avié counquist à nosto lengo, e qu'au soulèu d'amour durbié, d'aquéu moumen lou fres courau de sa Mióugrano ; Mathiéu ennivouli dins li vesioun de la Prouvènço, tournado coume antan cavaleirouso e amourouso ; Brunet emé sa caro de Crist de Galilèio, pantaiant l'utoupìo d'un paradis terrèstre ; lou païsan Tavan que plega sus l'eissado, cantejavo au soulèu, coume un grihet sus uno mouto ; e Frederi tout preste pèr traire au vènt-terrau lou crid de raço, pèr ucha (coume dison li pastre de mountagno) e pèr planta sus lou Ventour lou gounfaloun.

Il fut écrit au ciel qu'un dimanche fleuri, le 21 mai 1854, en pleine primevère de la vie et de l'an, sept poètes devaient se rencontrer au castel de Font-Ségugne : Paul Giéra, un esprit railleur qui signait Glaup (par anagramme de Paul G.) ; Roumanille, un propagandiste qui, sans en avoir l'air, attisait incessamment le feu sacré autour de lui ; Aubanel, que Roumanille avait conquis à notre langue et qui, au soleil d'amour, ouvrait en ce moment le frais corail de sa grenade ; Mathieu, ennuagé dans les visions de la Provence redevenue, comme jadis, chevaleresque et amoureuse ; Brunet, avec sa face de Christ de Galilée, rêvant son utopie de Paradis terrestre ; le paysan Tavan qui, ployé sur la houe, chantonnait au soleil comme le grillon sur la glèbe ; et Frédéric, tout prêt à jeter au mistral, comme les pâtres des montagnes, le cri de race pour héler, et tout prêt à planter le gonfalon sur le Ventoux…


A taulo, se parlè mai, coume èro l'habitudo, de ço que faudrié pèr tira noste lengage dóu cativié mounte jasié, despièi que, trahissènt l'ounour de la Prouvènço, li moussu l'avien redu, pecaire, à servi mèstre. E adounc, counsiderant que, di dous darrié Coungrès, aquéu d'Arle e aquéu d'Ais, noun èro rèn sourti que faguèsse prevèire un acord pèr adurre lou reabilimen de la lengo prouvençalo ; qu'au countràri, li reformo prepausado pèr li jouine de l'escolo avignounenco se i'èron visto, encò de forço, mauvengudo e mau-vougudo, li sèt de Font-Segugno, d'uno voues, deliberèron de faire bando à despart e agantant lou le, de lou jita mounte voulien.

À table, on reparla, comme c'était l'habitude, de ce qu'il faudrait pour tirer notre idiome de l'abandon où il gisait depuis que, trahissant l'honneur de la Provence, les classes dirigeantes l'avaient réduit, hélas ! à la domesticité. Et alors, considérant que, des deux derniers Congrès, celui d'Arles et celui d'Aix, il n'était rien sorti qui fit prévoir un accord pour la réhabilitation de la langue provençale ; qu'au contraire, les réformes, proposées par les jeunes de l'École avignonnaise, s'étaient vues, chez beaucoup, mal accueillies et mal voulues, les Sept de Font-Ségugne délibérèrent, unanimes, de faire bande à part et, prenant le but en main, de le jeter où ils voulaient.

Félibre

- Soulamen, diguè Glaup, d'abord que fasèn sang de-nòu, avèn besoun d'un noum nouvèu. Car, lou vesès : entre rimaire, emai trobon rèn de tout, tout acò se dis troubaire. D'autro part, i'a peréu lou mot de troubadou. Mai, usa pèr designa li pouèto d'uno epoco, aquéu noum es gausi pèr l'abus que se n'es fa. E à renouvelun fau ensigno nouvello.

- Seulement, observa Glaup, puisque nous faisons corps neuf, il nous faut un nom nouveau. Car, entre rimeurs, vous le voyez, bien qu'ils ne trouvent rien du tout, ils se disent tous trouvères. D'autre part, il y a aussi le mot de troubadour. Mais, usité pour désigner les poètes d'une époque, ce nom est décati par l'abus qu'on en a fait. Et à renouveau enseigne nouvelle !

Iéu, prenènt la paraulo, diguère :

Je pris alors la parole :

- Mis ami à Maiano, dins lou pople, i'a 'n vièi recitadis que s'es trasmés de bouco en bouco e que countèn, iéu crese, lou mot predestina.

- Mes amis, dis-je, à Maillane, il existe dans le peuple, un vieux récitatif qui s'est transmis de bouche en bouche et qui contient, je crois, le mot prédestiné.

E coumencère :

Et je commençai :


Monsegnour Sant-Anséume legissié, Escrivié. Un jour de sa santo escrituro,
Es mounta au cèu sus lis auturo.
Auprès de l'Enfant Jèsu, soun fiéu tant precious
A trouva la Vierge assetado.
En meme tèms l'a saludado.
Elo i'a di : Sigués lou bèn-vengu, nebout !
- Bello coumpagno, a di soun enfant, qu'avès vous ?
- Ai soufert sèt doulour amaro
Que vous li vole counta aro.

La proumiero doulour qu'ai souferto pèr vous,
O moun fiéu tant precious,
Es quand entendeguère iéu messo de vous,
Qu'au tèmple iéu me presentère,
Qu'entre li man de Sant-Simoun vous meteguère.
Me fuguè 'n coutèu de doulour
Que me tranquè lou cor, me travessè moun amo,
Emai à vous, O moun fiéu tant precious !

La segoundo doulour qu'ai souferto pèr vous, etc.
La tresèimo doulour qu'ai souferto pèr vous, etc.
La quatrèimo doulour qu'ai souferto pèr vous,
O moun fiéu tant precious !
Es quand vous perdeguère,
Que de tres jour, tres niue, iéu noun vous retrouvère,
Que dins lou tèmple erias,
Que vous disputavias
Emé li tiroun de la Lèi,
Emé li sèt felibre de la Lèi.

Monseigneur saint Anselme lisait
et écrivait.
Un jour de sa sainte écriture,
il est monté au haut du ciel.
Près de l'Enfant Jésus, son fils très précieux,
il a trouvé la Vierge assise
et aussitôt l'a saluée.
Soyez le bienvenu, neveu ! a dit la Vierge.
Belle compagne, a dit son enfant, qu'avez-vous ?
J'ai souffert sept douleurs amères
que je désire vous conter.

La première douleur que je souffris pour vous,
ô mon fils précieux,
c'est lorsque, allant ouïr messe de relevailles,
au temple je me présentai,
qu'entre les mains de saint Siméon je vous mis.
Ce fut un couteau de douleur
qui me trancha le cœur, qui me traversa l'âme,
ainsi qu'à vous, ô mon fils précieux !

La seconde douleur que je souffris pour vous, etc.
La troisième douleur que je souffris pour vous, etc.
La quatrième douleur que je souffris pour vous,
ô mon fils précieux !
c'est quand je vous perdis,
que de trois jours, trois nuits, je ne vous trouvai plus,
car vous étiez dans le temple,
où vous vous disputiez,
avec les scribes de la loi,
avec les sept félibres de la Loi.

- Li sèt felibre de la Lèi, mai es nous-autre ! la taulado cridè, va pèr felibre !

- Les sept félibres de la Loi, mais c'est nous autres ! écria la tablée. Va pour félibre !

Trésor du Félibrige

- Es pas lou tout, coulègo ! Sian li felibre de la Lèi… Mai la lèi quau la fai ?

- Ce n'est pas tout, collègues ! nous sommes les félibres de la loi… Mais, la Loi, qui la fait ?

- léu ! diguère e vous jure que, devriéu aqui metre vint an de ma vido, vole, pèr faire vèire que nosto lengo es lengo, encarta lis article de lèi que la regisson…

- Moi, dis-je, et je vous jure que, devrais-je y mettre vingt ans de ma vie, je veux, pour faire voir que notre langue est une langue, rédiger les articles de loi qui la régissent.

Drolo de causo ! sèmblo un conte ; e pamens es d'aqui, d'aquel engajamen pres en un jour de fèsto, un jour de pouësìo e d'embriagadisso, que sourtiguè l'einorme, l'achinissènt pres-fa de moun Tresor dóu Felibrige o Diciounàri de la lengo prouvençalo, ounte s'es foundu vint an d'uno carriero de pouèto.

Drôle de chose ! elle a l'air d'un conte et, pourtant, c'est de là, de cet engagement pris un jour de fête, un jour de poésie et d'ivresse idéale, que sortit cette énorme et absorbante tâche du Trésor du Félibrige ou dictionnaire de la langue provençale, où se sont fondus vingt ans d'une carrière de poète.

E quau n'en doutarié noun a que de legi lou pourtissoun de Glaup, dins l'Armana prouvençau de 1855, ounte acò's claramen counsigna coume eiçò :

« Quand auren touto lèsto la Lèi qu'un felibre adoubo e que dis, miés que noun poudès lou crèire, perqu'acò's ansin, perqu'acò's autramen, faudra bèn que res mute. »

Et qui en douterait n'aura qu'à lire le prologue de Glaup (P. Giéra) dans l'Almanach provençal de 1885, où cela est clairement consigné comme suit :

« Quand nous aurons toute prête la Loi qu'un félibre prépare et qui dit, beaucoup mieux que vous ne sauriez le croire, pourquoi ceci, pourquoi cela, les opposants devront se taire. »

En aquelo sesiho, veramen memourablo e passado au-jour-d'uei à l'estat de legèndo, se decidè la publicacioun, souto formo d'armana, d'un pichot recuei annau que sarié lou simbèu de nosto pouësìo, l'espandidou de nosto idèio, lou tra-d'unioun entre felibre, la coumunicacioun dóu Felibrige emé lou pople.

C'est dans cette séance, mémorable à juste titre et passée, aujourd'hui, à l'état de légende, qu'on décida la publication, sous forme d'almanach, d'un petit recueil annuel qui serait le fanion de notre poésie, l'étendard de notre idée, le trait d'union entre félibres, la communication du Félibrige avec le peuple.

Sainte Estelle

Pièi, tout acò regla, l'on s'avisè, ma fisto, que lou 21 de Mai, dato de noste acamp, èro lou jour de Santo Estello ; e, coume li rèi Mage, recouneissènt aqui l'aflat misterious de quauco auto counjounturo, saluderian l'Estello que presidavo au brès de nosto redemcioun.

Puis, tout cela réglé, l'on s'aperçut, ma foi, que le 21 de mai, date de notre réunion, était le jour de sainte Estelle ; et, tels que les rois Mages, reconnaissant par là l'influx mystérieux de quelque haute conjoncture, nous saluâmes l'Étoile qui présidait au berceau de notre rédemption.

estello di sèt rai

La sainte Estelle
Lou Tresor dóu Felibrige, Dictionnaire provençal-français (extraits) :

ESTELLO

étoile
santo Estello, sainte Estelle. Sainte Estelle a été choisie pour patrone par les Félibres, à cause de son nom symbolique et de la date de sa fête qui rapelle l'anniversaire de la fondation du Félibrige, le 21 mai 1854, à Font-Ségugne. Une étoile à sept rayons, l'estello di sèt rai, est devenue par suite l'emblème du Félibrige, la réunion solennelle de cette association a lieu annuellement le jour de la sainte Estelle.

Frédéric Mistral : biographie & œuvres en ligne

Trésor du Félibrige : dictionnaire provençal-français de Frédéric Mistral

La Coupo : hymne de la Provence, de Frédéric Mistral

langue provençale : dictionnaire & littérature

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