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John Bost
par Henry Rey-Lescure

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photo John Bost




Le pasteur et médecin Henry Rey-Lescure (1901-1984) est directeur de la Fondation John Bost, de 1936 à 1976. Il est aussi conseiller général du canton de La Force, de 1945 à 1973, et adjoint au maire de La Force.

C'est le petit-fils du pasteur Franz Leenhardt (1846-1922) et Louise Westphal.

C'est le cousin de Suzanne Leenhardt, mère de Léopold Nègre, qui a épousé Suzanne Charon, la petite-fille de John Bost.




La Fondation John Bost, telle que nous l'avons connue…
par Henry Rey-Lescure, directeur de la Fondation John Bost
(1978)

La Fondation John Bost aura cette année cent trente ans d'existence. C'est dire qu'il s'agit d'une œuvre fort ancienne, bien enraciné dans la durée, et dont l'histoire est, en quelque mesure, exemplaire.


On nous demande souvent quelques éclaircissements sur ce qui fait son originalité et sa vitalité. Mais les publications sur la vie et l'œuvre de John Bost sont nombreuses et bien documentées. Et nous renvoyons en général à l'ouvrage, plusieurs foie réédité d'Alexandre Westphal John Bost et sa cité prophétique. On y verra comment, au milieu du dix-neuvième siècle, dans cette période de réveil de la foi et de l'esprit d'entraide, La Force a été un haut-lieu de l'espérance et de la charité chrétienne.


En 1844, le jeune pasteur Jean Antoine Bost, dit John Bost, arrive dans ce chef-lieu de canton de la Dordogne. Avec son énergie et son enthousiasme il intéresse ses paroissiens à la construction d'un temple auquel est annexé un asile pour les jeunes filles orphelines ou en danger moral. Cette maison, La Famille, est inaugurée en 1848. Et c'est là que commence ce qu'on a appelé « l'épopée des Asiles ». Avec les demandes d'admission pour La Famille, John Bost a la révélation d'autres misères que celles des orphelines, la grande pitié des infirmes, des débiles, des idiots, de ceux qu'on désignerait aujourd'hui sous le nom d'« handicapés » du corps et de l'esprit. Il est pour ainsi dire contraint de construire l'asile de Béthesda, celui de Siloé pour les hommes, celui d'Ében-Hézer pour les épileptiques, etc… De telle sorte qu'à sa mort, en 1881, à l'âge de 64 ans, il laisse son à successeur Ernest Rayroux, la responsabilité de neuf asiles correspondant à des catégories diverses de déficients.


Et la question n'est pas de construire des bâtiments, mais de trouver les fonds pour la nourriture quotidienne, pour l'habillement, le mobilier, le personnel. Pendant environ trente-cinq ans John Bost a montré des qualités d'animateur. d'administrateur, de pédagogue, de collecteur. Il a été surtout un homme d'action qui mêlait l'exigence du devoir a la bonté la plus simple et la plus exquise. C'est ainsi qu'il nous souvient d'une sorte témoignage d'Élisabeth Roger, ancienne directrice de Béthesda un jour John Bost avait dû sévir et s'était presque mis en colère contre des pensionnaires indisciplinées à qui une punition avait été donnée. En voiture pour Bergerac avec Mlle Roger à qui il parlait avec indulgence de cette affaire, il fait brusquement demi-tour pour réduire la punition.


Rayroux donne l'impression d'une personnalité plus détendue, plus facile à vivre, bien que sachant ce qu'elle voulait. C'est ainsi qu'il fut amena à construire un nouveau Béthesda en bordure du coteau, à une bonne distance de l'ancien qui barrait l'horizon d'Ében-Hézer, et qui fut en partie démoli. Le plan fourni par l'architecte Henriquet, architecte de la ville de Bergerac, marquait avant tout le souci d'avoir un bâtiment « spacieux, commode et hygiénique ». On inaugura celui-ci en 1894.


Mais Rayroux mourut en 1902, et c'est son propre gendre le pasteur Charles Bott qui lui succéda.


Le troisième directeur des Asiles y exerça son ministère pendant dix-huit ans. Les témoins de sa vie disent tous quels efforts il avait dû faire pour maintenir l'œuvre, matériellement et spirituellement, surtout pendant la guerre de 1914-1918. Personnellement nous avons fait sa connaissance vers 1922 à l'occasion d'un congres de la Fédération des étudiants chrétiens. Il paraissait déjà alourdi, fatigué, et il est mort prématurément en 1929.


Le quatrième directeur général fut Alfred Casalis, ancien missionnaire en Afrique du Sud. Son arrivée coïncida avec la réalisation par le Conseil d'administration, que présidait M. Jacques de Bethmann, d'un plan de grands travaux de modernisation : chauffage central, adduction d'eau, assainissement, etc… Puis on entreprit l'aménagement d'un nouvel Asile pour les jeunes garçons arriérés ré-éducables, « l'Espérance » inauguré en 1930, et bientôt suivi d'une importante annexe pour les petits arriérés techniquement inéducables, mise en service en 1934.


On peut se rendre compte d'après cette énumération que malgré les années et les changements de directeurs, l'œuvre des Asiles John Bost a montré une belle vitalité. Et quand Alfred Casalis prendra sa retraite en 1936, le nombre des pavillons sera de 11 et la population des pensionnaires de 515.


Cette date de 1936 a son importance en ce sens qu'attaché nous-même à ce moment au personne de la Fondation, comme médecin puis comme directeur général, nous avons pu suivre directement les évènements qui sont déroulés jusqu'en 1968. Autrement dit nous apportons notre témoignage sur cette période de trente ans. Non point que nous voulions privilégier ce temps par rapport à l'histoire des années précédentes, mais nous pensons qu'appelé à évoquer la vie d'une grande institution, notre devoir était essentiellement de parler de ce dont nous avons été un témoin oculaire.


Nous nous souvenons des derniers six mois du séjour de M. et Mme Alfred Casalis à La Force, aidés par le pasteur et Mme Albert Lung, avec comme cheville ouvrière le dévoué Albert Cochand, l'économe comptable. Il est difficile de décrire l'atmosphère spirituelle dans laquelle on vivait : sérénité du Sud-Ouest, douceur du troisième âge, bonté de source évangélique, hospitalité avec quelque nuance anglaise ou suisse. Le livre de Westphal est la peinture de cette époque. Il exprime bien l'ambiance, ressentie par l'auteur, de cité prophétique et d'épar nt de la charité chrétienne.


Maintenant quelles furent les nouvelles données de la situation de 1936 ? Essentiellement, que les progrès récents de la médecine devaient avoir un retentissement sur notre organisation médicale… Le docteur Léopold Nègre, chef de service à l'Institut Pasteur et apparenté par alliance à la famille Bost, présenta au Conseil d'administration des Asiles un rapport très motivé. On pensait qu'il était possible de prendre l'aile ouest d'Ében-Hézer pour avoir à l'entrée des Asiles une sorte de centre médical. On grouperait la une salle de radiologie, un laboratoire, des salles de consultation et de traitement, et aussi certains cas de malades nécessitant quelques soins spéciaux à la portée du médecin généraliste et d'un personnel plus entraîné que celui des infirmeries pavillonnaires.


Une première tranche de travaux élaborée par notre Ingénieur conseil M. Poutays, aboutit à l'inauguration du Pavillon médical en 1938. Cette Installation médicale a rendu les plus grands services surtout pendant les années de guerre et notamment en 1944 où nous l'avons fait fonctionner comme hôpital-auxiliaire pour les blessés français ou allemands des opérations de la Libération.


Le projet de reconstruction d'Ében-Hézer ne fut jamais exécuté à cause de le guerre. Et dans l'après-guerre se posaient d'autres plus urgents tel que celui de l'Abri et de la situation des enfants inéducables. De telle sorte que l'ancien Ében-Hézer ne fut pas démoli, mais conforté d'une aile à l'est et de quelques chambres l'ouest…


Nous ne saurions trop insister sur l'intérêt qu'a présenté le Pavillon médical à une époque où le médecin de l'établissement cumulait des fonctions variées avec une instrumentation assez moderne, qui comprenait notamment un bon microscope, un appareil de radiographie, et ultérieurement un appareil à électrochocs. Il y a donc eu un effort de centralisation de l'appareillage médical et même une tentative de regroupement de certaines catégories de malades. En particulier nous avons entretenu pendant plusieurs années un certain nombre de parkinsoniens rescapés de l'épidémie d'encéphalite de 1921.


Et le cadre d'Ében-Hézer a permis d'hospitaliser certains schizophrènes en rémission provisoire, ou des épileptiques avec troubles caractériels ou organiques surajoutés.


À la vérité cette question d'hospitalisation se posa avec acuité. Déjà en 1939 on fut appelé à recueillir cinq établissements protestants évacués de Strasbourg, soit 450 personnes. La cohabitation avec les Strasbourgeois se révéla comme une expérience intellectuellement et spirituellement enrichissante.


Elle fut aussi la raison pour laquelle les services préfectoraux firent construire en bordure de nos terrains deux grands baraquements qui, au cours des années, ont eu de multiples donations : réorganisation de la section des fillettes arriérées de Béthesda, logements, foyer du personnel des Asiles, etc…


Mais pendant la période de guerre on dut se contenter d'aller au plus pressé, à savoir aménager Béthel, et reconstruire Siloé qui avait en partie brûlé lors de l'armistice de 1940… M. Marc Cazalis, notre architecte, essaya d'améliorer aussi le sort des grands infirmes de la Miséricorde, en adjoignant à la salle de jour un grand solarium… En 1947, nous fûmes amenés à accepter la charge de l'Asile protestant de vieillards de Port-Sainte-Foy. Cette maison centenaire n'avait plus que quelques pensionnaires. Et nous ne fûmes pas en peine pour augmenter l'effectif.


Nous avons pu ainsi compléter nos pavillons pour personnes âgées (le Repos et la Retraite), par un autre établissement un peu différent aux environs immédiats de la petite agglomération girondine de Sainte-Foy-la-Grande. À noter que le Port a comporté pendant plusieurs années une annexe appelée maison Mousquès, ou encore le Logis, qui a fait l'objet d'une transaction ultérieure.


Mais notre attention a été surtout sollicitée par la situation des garçons inéducables. On sait qu'ils étaient logés à côté de l'Espérance dans des locaux assez bien aménagés, mais où ils étaient plutôt à l'étroit. Une partie des services était assurée par quelques pensionnaires de Siloé, et le personnel féminin n'avait pas la place nécessaire pour faire un jardin d'enfant ou tenter une véritable rééducation. On était un peu préoccupé par certains cas d'« hospitalité » ou d'« abandonite »… Et le Conseil d'administration, encouragé par son excellent trésorier, M. Roger de Luze, accepta de faire construire dans le périmètre des Asiles de femmes, un Abri correspondant un peu à ce qui se faisait en Suisse.


Il fut implanté sur l'emplacement que nous avions prévu antérieurement pour une reconstruction d'Ében-Hézer. Et comme les moyens financiers d'après-guerre étaient restreints, on s'obligea à procéder en deux étapes et avec la plus stricte économie.


Dès l'inauguration en 1951, l'Abri était pleinement occupé. Cela permettait de réapprécier les niveaux d'éducabilité des pensionnaires ; ce qui a réservé quelques heureuses surprises. On a dégagé aussi le territoire de l'Espérance dont l'annexe destinée maintenant à la formation scolaire et professionnelle fut dénommée l'Atelier, qui comprenait en effet des ateliers de menuiserie, de forge, etc…


Pour compléter ce que nous avons dit sur l'Abri, il faut ajouter que douze ans après, c'est-à-dire en 1963, on essaya de donner plus d'espace vital aux petits garçons gravement handicapés, en construisant dans la cour du midi une aile centrale divisée pour six groupes d'enfants.


On pouvait penser qu'avec la construction de l'Abri le problème d'hospitalisation des petits garçons techniquement inéducables était pratiquement résolu. Mais inévitablement devait se poser la même question pour les fillettes arriérées… Nous avons expliqué que les débiles moyennes du niveau de Béthesda avaient été regroupées à partir de 1941 dans des baraquements du service des Réfugiés.


Par ailleurs l'effectif des orphelines de La Famille avait beaucoup diminué de telle sorte qu'on fut amené à faire une sorte de chasse-croisé : ces enfants seraient transférées au baraquement sous le nom de « la Nouvelle Famille », et les débiles moyens occuperaient le bâtiment de La Famille sous la direction de Mlle Alice Noël. Il faut noter que la section des débiles moyennes s'est appelée l'Attente jusqu'au moment de ce transfert, c'est-à-dire en 1953. Ce vocable n'a reparu que quelques années après, et pour un autre bâtiment.


Cet autre nouveau bâtiment a pour origine la constatation que l'effectif des pensionnaires de la Miséricorde est trop nombreux et trop mélangé. Des fillettes très profondément handicapées coexistaient dans les salles de jour avec des pensionnaires adultes ou même âgées. Il convenait de les séparer et de faire pour les filles débiles profondes ce que nous avions tenté pour les garçons de l'Abri. Justement après de très patientes démarches auprès de l'ancien propriétaire, nous avions pu acquérir une petite propriété parfaitement située entre nos Asiles. Et tout naturellement le Conseil d'administration décida de construire le pavillon pour les fillettes arriérées profondes qui portera définitivement le nom de l'Attente qui sera inauguré en 1958.


Mais l'attention se reporte vers les Asiles d'hommes où notamment la Compassion est encombrée. En effet à l'adolescence certains grands garçons de l'Abri posent de sérieux problèmes. Force est de diriger ces adolescents sur la Compassion. Mais il finit par y avoir pléthore. Et l'on prévoit une révision provisoire des pensionnaires du Bourg d'Abren. Un bâtiment en chaussée comportant une très grande salle de jour et quelques dortoirs latéraux permettra de regrouper des pensionnaires âgés de Siloé et de Béthel. Cette installation est terminée en 1963, et portera le nom de pavillon de Bethmann en souvenir de M. Jacques de Bethmann qui fut membre, puis président, du Conseil d'administration de 1907 à 1961.


Mais il convenait d'achever la manœuvre qui aurait permis de mettre les adolescents, au sortir de l'Abri, dans une maison qui leur serait réservée et où ils séjourneraient pendant quelques années, avant de descendre aux Asiles d'hommes. C'est dans cet esprit qu'on a créé dans la partie haute de Meynard, un pavillon appelé Bellevue. Meynard est une grande propriété au nord de La Force. Elle appartenait auparavant à la famille Bost, par succession d'Eugénie Ponterie, la femme de John Bost. La maison elle-même avait brûlé en 1944. Mais par sa situation, par ses bois, ses terres, Meynard pouvait rendre service au point de vue cultures et territoire de scoutisme pour les jeunes pensionnaires de l'Espérance. Par ailleurs les Asiles avaient hérité à Villefranche-de-Lonchapt, à trente kilomètres de La Force, de la propriété de Mondésir que leur avait légué Mme Duvigneau. Il est apparu au trésorier du Conseil d'administration. M. Roger de Luze, qu'on pouvait faire une sorte d'opération d'échange. On a vendu Mondésir et l'on est devenu propriétaire de Meynard en 1945. En 1964 on commençait Bellevue, en respectant la pente du terrain et la vue magnifique vers la plaine et les coteaux environnants.


Nous nous permettons de faire remarquer que tout en évitant de détoner avec le paysage et les usages régionaux, nous avons été tenus à une stricte économie, et à la recherche du commode et du fonctionnel. Nous avons essayé simplement cle nous adapter aux besoins des utilisateurs supposés, et aux capacités des artisans locaux.


On a pu ainsi parer l'augmentation considérable de pensionnaires. Pour bien dire, le total en est passé d'environ 550 à plus de 1050 en 1965.


D'où vient cette progression, sinon de la pénurie relative en France, à ce moment-là, d'établissements pour débiles profonds, et des possibilités d'accueil de la Fondation John Bost.


Le fait est que cette importance numérique créait des devoirs et ds responsabilités nouvelles, notamment a cause des progrès de la médecine. C'est une époque où les antibiotique et les neuroleptiques ont transformé le pronostic de beaucoup de maladies contagieuses ou de maladies psychiques. On croit à l'éfficacité de la thérapeutique pharmacologique, et aussi aux traitements psychologiques ou psychothérapeutiques.


Le service médical augmente. À partir de 1956 le docteur Groschatau est adjoint pour la médecine générale, tandis que le médecin titulaire ne fait plus que la neuropsychiatrie. Puis en 1964, le docteur Corriger apporte son concours. On a aussi une pharmacienne et une psychologue. On fait beaucoup plus souvent appel aux spécialistes, pour des examens de laboratoire ou pour des interventions chirurgicale.


Le personnel est plus nombreux. On dira que c'est peu de choses de changer une appellation. Mais le personnel de surveillance s'appelle maintenant « moniteurs », et « monitrices », pour insister sur la vocation pédagogique, éducative, plutôt que sur des fonctions de maternage ou de gardiennage. Et pour améliorer le niveau des soins d'infirmerie on crée, avec le concours de la Direction départementale de la santé, une formation régulière d'aides-soignantes sanctionnée par un examen final. Il est sûr qu'on s'était préoccupé auparavant d'avoir plus ou moins régulièrement des conférences d'ordre médical ou psychologique. On a toujours des cours et travaux pratiques pour la préparation d'auxiliaires sanitaires, de secouristes etc…


Mais à partir peu prés de 1960 s'impose davantage une nouvelle génération la notion de « diplôme » susceptible d'avoir même valeur à l'extérieur, dans les institutions similaire. De sorte qu'en 1965 on a, dans les divers pavillons de la Fondation, 49 personnes munies de ces diplômes.


Cette même année, on eût l'idée de préparer à un autre diplôme moins hospitalier, moins infirmier, et plus pédagogique, plus éducatif. un diplôme de moniteur-éducateur. Évidemment dans les classes d'enfants arriérés qui dépendent du Ministère de l'éducation nationale (la Famille et l'Espérance), l'enseignement était donné par des instituteurs ou institutrices spécialisés. Mais la rééducation des déficients n'est pas simplement scolaire. Elle nécessite des soins attentifs et continus, des techniques psychologiques et une certaine maturité de la personnalité. À l'initiative de Géraud Rey-Lescure, à cette époque directeur-adjoint de la Fondation, et avec le concours de Max Bramerie, s'ouvrit à La Force une école de moniteurs-éducateurs, officialisée au début de 1966.


Comme nous l'avons indiqué plus haut, 1966 est une année de transition. Le docteur Henry Rey-Lescure, médecin neuropsychiatre, prend sa retraite après avoir occupé pendant trente ans les postes de médecin titulaire et de directeur général des Asiles de La Force. Il est remplacé le docteur Guy Henri, médecin colonel en retraite à Bergerac et membre du Conseil d'administration.


Et dans l'ensemble il n'y a pas de grand hiatus dans la vie quotidienne de la Fondation.


L'école de moniteurs-éducateurs va connaître un développement remarquable et devenir Centre de formation professionnelle sanitaire et sociale en cours d'emploi. Cette école, de rayonnement régional, sera habilitée aux divers enseignements en vue d'examens de moniteurs-éducateurs ou d'aides médico-psychologiques. Elle sera domiciliée dans l'immeuble qui abritait, au temps d'Albert Cochand, les services de l'économat et de la comptabilité.


En effet, cette maison était devenue bien insuffisante à cause de l'augmentation des opérations administratives. Déjà trente ans auparavant elle avait été agrandie pour installer le bureau du directeur. À une autre époque il avait fallu aussi des locaux pour l'architecte, le directeur-adjoint, les médecins, le service d'accueil des visiteurs ou des pensionnaires, une salle de réunion pour le Conseil d'administration, etc… De toutes manières, l'ancienne comptabilité ne pouvait répondra aux multiples besoins.


On s'avisa qu'on aurait un emplacement mieux situé, à l'arrivée sur le plateau de La Force à côté d'une vieille maison réparée depuis dans le style du pays et qu'on a appelée Maison John Bost. C'est là qu'on résolut de construire l'Accueil. La question financière étant fortement simplifiée par un don suisse important, les travaux furent achevés en 1970.


On ne peut pas ne pas signaler que le patrimoine s'est augmente d'un ensemble de bâtiments, à Port-Sainte-Foy, et bien connu sous le nom d'École de Guyenne. En réalité il s'agissait au siècle dernier d'une Colonie agricole qui recevait des garçons difficiles. Elle devient ensuite institut d'agriculture, puis collège secondaire. C'était une des plus belles œuvres protestantes dans la vallée de la Dordogne. Mais des raisons de recrutement et de finances amenèrent l'œuvre fondatrice à faire des ouvertures à la Fondation John Bost. Après un examen très attentif, celle-ci décida d'accepter cet apport qui n'était pas gratuit.


En 1969, le docteur Guy Henri prenait sa retraite. Après quelques mois de direction collégiale, Géraud Rey-Lescure fut nommé directeur de la Fondation. Il avait déjà treize années de travail à La Force comme secrétaire-générai, puis comme directeur adjoint. Il connaissait les pensionnaires aussi bien que le personnel. Et dans l'ensemble son action fut constructive. Mais nous étions dans une phase de mutation ; Géraud Rey-Lescure sentit des réticences au Conseil d'administration et préférera donner sa démission en 1972.


On fit alors appel au pasteur André Rouverand qui paraissait très qualifié, par son caractère et ses expériences antérieures, pour comprendre les différents aspects d'une collectivité de souffrants et d'infirmes. Et dès lors, fermement appuyé par le Conseil d'administration unanime, le nouveau directeur entreprenait cette sorte de ministère pastoral élargi.


Il bénéficiait des derniers mois d'activité, du président Gaston Bost et des sages conseils de son successeur le professeur Louis Pouyanne. Il était entouré d'une équipe de collaborateurs très valables parmi lesquels nous nous bornerons à citer le secrétaire général Yves Guiton et le docteur Philippe Gabbaï, neuropsychiatre, directeur des services médicaux… Nous regrettons de ne pouvoir mentionner les noms des 742 membres du personnel qui contribuent, en divers postes, au soin des résidents et la bonne marche de l'œuvre. Car en vérité une œuvre comme celle de La Force dépend essentiellement de la bonne volonté, de l'esprit de service et de la compétence du personnel.


Nous n'entrerons pas dans le jeu des comparaisons, par lequel le présent est opposé à « autrefois » ; par lequel le passe est surévalué ou sous-évalué. Contentons-nous d'indiquer que si le nombre du personnel a sérieusement augmenté, ce qui était administrativement inévitable. les qualifications se sont beaucoup diversifiées (psychologues, kinésithérapeutes, animateurs, gardes de nuit, etc…).


Dans ces conditions nous pensons qu'on a eu raison d'instituer des réunions régulières dans les pavillons : réunions d'équipe, réunions de synthèse ou de bilan, etc… Bien organisées, ces rencontres facilitent la communication interprofessionnelle et échanges humains.


On s'est préoccupé aussi de changement ou de regroupement des résidents. On avait fait un vaste schéma d'orientation pour la redistribution des pensionnaires selon leur cas, leurs handicaps, leurs affinités. On se vit donc obligé à faire une révision complète de chaque situation individuelle, ce qui fut assez favorable, compte tenu de la longue durée de certains séjours dans l'établissement.


Une autre décision encore a paru assez ré-éducative sinon thérapeutique, celle de faire des ateliers, tels que ceux de Guyenne ou de Guilgal, où les résidents iraient dans la journée exécuter certains travaux. C'est une organisation de l'ergothérapie à l'extérieur de leur propre pavillon, qui s'est révélée plutôt bénéfique.


Enfin, symptôme très important de vitalité, le Conseil d'administration a donné avis favorable à l'ouverture du chantier d'un 18e pavillon destiné aux arriérés profonds grabataires et polyhandicapés. Ce pavillon situé à quelque distance de l'Abri correspond aux nécessités d'hospitalisation d'une catégorie spéciale de déficients. Et, dans les circonstances actuelles, cette construction est un acte de foi.


Acte de foi, avons-nous dit, et non point témérité ou démesure. Car en nous reportant l'histoire de la Fondation John Bost on ne peut qu'éprouver le sentiment d'une continuité : continuité dans l'appel, fidélité dans la réponse. Et comme John Bost, ses successeurs se sont trouvés devant des déshérités, des handicapés des « prochains » de plusieurs sortes, auxquels il aurait fallu porter secours. Et ils ont fait partager leur préoccupation à de nombreux amis qui se sont montrés attentifs et bienfaisants. Ils ont donné leur temps ou leur argent. C'est ainsi qu'à chaque génération, l'œuvre a été comme soutenue, comme portée, par des donateurs et des intercesseurs convaincus.


Jusqu'ici la Fondation a connu des années à problèmes et des années plus faciles. Mais nous sommes rassurés sur son avenir, tant qu'elle aura comme moteur et comme raison d'être la « volonté de servir et d'aimer ».




Henry Rey-Lescure
Henry Rey-Lescure
La Fondation John Bost, telle que nous l'avons connue…
(1978)
Notes :

- Henry Rey-Lescure (1901-1984) est le petit-fils du pasteur Franz Leenhardt (1846-1922) et Louise Westphal (1852-1933), sœur d'Alexandre Westphal (1861-1951).

Il est directeur de la Fondation John Bost (1936-1976), élu (centre gauche) conseiller général du canton de La Force (1945-1973), et adjoint au maire de La Force.

Lire : Un serviteur, Henry Rey-Lescure par André Rouverand, directeur de la Fondation John Bost (1984), discours prononcé le jour des obsèques d'Henry Rey-Lescure, dans le temple de la Fondation.

« C'est bien, bon et fidèle serviteur » (Matthieu 25, 21)

- Géraud Rey-Lescure est le fils d'Henry Rey-Lescure.

- Le frère d'Henry, Philippe Rey-Lescure (1897-1978) est un pasteur missionnaire en Nouvelle-Calédonie, comme son oncle Maurice Leenhardt. Il prend sa retraite en 1957 à La Force. Sa femme, Alice, est alors directrice de La Retraite.

Élections législatives du 23 novembre 1958 : candidature du docteur Rey-Lescure (professions de foi des candidats)

John Bost : index des documents

portraits de John Bost : photographies & gravures



L'Église chrétienne considérée comme Asile de la souffrance : thèse de John Bost présentée à la faculté de théologie de Montauban (1880)

Notice historique de la fondation des Asiles de Laforce par John Bost

Origines des Asiles de Laforce par John Bost (1878) texte manuscrit

Asiles de Laforce en 1878 : liste des bâtiments & résidents

La Famille - Béthesda - Ében-Hézer - Siloé - Béthel - Le Repos - La Retraite - La Miséricorde

Le temple des Asiles


Les Asiles John Bost par Henriette Guizot de Witt, Revue Suisse (1889)

Souvenirs par son frère Élisée Bost (1898)

Discours du pasteur Adolphe des Gouttes (1924)

John Bost et sa cité prophétique par le pasteur Alexandre Westphal (1937)

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