Les recherches organisées depuis bien des années par le Coast Survey des États-Unis, et encore aujourd'hui en cours, ont établi que le Gulf Stream n'a point, dans la mer des Antilles et dans le golfe du Mexique, le parcours que lui prêtent les cartes françaises, anglaises et allemandes, même les plus récentes.
Le grand courant équatorial de l'Atlantique, après avoir été dévié par les côtes de l'Amérique du Sud, rencontre la série des petites Antilles qui l'infléchissent au nord-ouest en ne laissant passer entre elles que de faibles quantités d'eau dont la plus grande semble trouver passage entre la Trinité et la côte de Vénézuela. On admet encore aujourd'hui l'existence d'un courant circulaire dans la partie antérieure ou orientale de la mer des Antilles, limitée à l'ouest par la série de hauts-fonds qui régnent entre la Jamaïque et le cap Gracias a Dios et qui ne laissent passer dans la partie postérieure ou occidentale de la mer des Antilles que de faibles courants superficiels. Les eaux de la partie orientale s'échappent au nord par le passage de Mona, entre Haïti et Puerto Rico.
La partie postérieure ou occidentale de la mer des Antilles reçoit encore des eaux par le Canal du Vent, entre Haïti et Cuba, où le courant est assez tort pour nettoyer le fond de toutes les boues qui vont s'accumuler sur les bas-côtés de cette entrée.
Les eaux qui pénètrent dans le golfe du Mexique par le canal de Yucatan, parvenues à environ un tiers de la distance qui sépare le cap Galoche des bouches du Mississipi, se trouvent infléchies vers l'est, vers le Canal de la Floride, dans la seule direction par où elles puissent s'échapper, par cette sorte de muraille que leur oppose la masse des eaux du golfe du Mexique. Celles-ci sont généralement froides, tant à la surface que dans leurs profondeurs, et ne présentent point ces courants constants que leur attribuent nos cartes et qui iraient, d'après elles, lécher les côtes du nord du Yucatan, du golfe de Campèche, du Mexique et du sud des États-Unis.
En sortant du golfe du Mexique par le canal de la Floride, les eaux du Gulf Stream viennent se joindre à toute la masse des eaux du grand courant équatorial dévié, comme nous l'avons vu, par la côte de l'Amérique du Sud, par les Antilles et enfin par l'Amérique du Nord.
C'est donc à ce grand courant équatorial, rejeté ainsi en grandes masses vers les côtes occidentales de l'Europe, qu'il faut attribuer les effets que nous avons assignés jusqu'ici au Gulf Stream, celui-ci n'étant qu'un faible ruisseau, comparé à ce fleuve immense dont il ne s'était séparé que sur une partie de son trajet.
→ James Jackson (1843-1895)
→ Tableau de diverses vitesses exprimées en mètres par seconde, par James Jackson (1885)
• Liste provisoire de bibliographies géographiques spéciales, par James Jackson, Société de Géographie (1881)